Lettre ouverte Au Président de la République, M. Emmanuel Macron et les Membres de Parlement de la France 

Monsieur le Président,

Membres de Senat,

Membres de l’Assemblée Nationale de la France,

A la veille de la visite officielle du président azerbaïdjanais Ilham Aliyev, nous vous demandons de soulever lors de vos rencontres les problèmes liés à la liberté d’expression en Azerbaïdjan, ainsi que d’exhorter Monsieur Aliev de libérer de prison tous ses détracteurs et de mener toutes les réformes nécessaires pour augmenter la responsabilité des autorités face aux médias et devant le peuple.

Ilham Aliyev a intensifié la pression sur ses détracteurs immédiatement après une nouvelle réélection douteuse en avril de cette année pour un quatrième mandat présidentiel, augmenté de 5 à 7 ans. Ayant succédé à son père, l’ancien Président Heydar Aliyev en 2003, Ilham Aliyev a détruit en 15 ans la liberté de la presse et les institutions de la société civile. Par des amendements anti-démocratiques à la Constitution de l’Azerbaïdjan, Ilham Aliyev a parvenu à l’abolition de la limite deux réélections de la même personne au poste de président du pays. Ayant complètement affaibli les institutions démocratiques, Ilham Aliyev a nommé son épouse Menhriban Aliyev premier vice-président de l’Azerbaïdjan en février 2017, en créant ainsi un cas mondial sans précédent de népotisme et de kleptocratie.

Les membres de la famille du président ont écrasé toute l’économie du pays, érigeant ainsi la corruption de l’Azerbaïdjan à une des premières places les plus honteuses du monde.

Aujourd’hui en Azerbaïdjan, non seulement les critiques et les combattants contre la corruption sont enfermés dans les prisons, mais la géographie de la persécution des critiques a largement dépassé les frontières de l’Azerbaïdjan. En plus des tentatives de persécution des critiques natifs du pays qui sont en exil politique au sein de l’Union européenne, les autorités azerbaïdjanaises ne cessent pas de harcéler les journalistes étrangers, dont des journalistes français. Ainsi, par exemple, les autorités ont entamé un procès contre deux célèbres journalistes d’investigation français, Laurent Richard et Emmanuel Bach, et exigent que le tribunal français les tien pour responsables.

En utilisant l’impunité actuelle et le manque de surveillance de la part de la société civile, les mécanismes de corruption et le blanchiment d’argent de la part de l’élite dirigeante de l’Azerbaïdjan a dépassé les frontières de l’Azerbaïdjan et s’est étendue aux pays de l’Union européenne, dont la France. Les investigations journalistiques des trois dernières années montrent que le gouvernement d’Aliyev a soudoyé les politiciens français et européens et les hauts fonctionnaires des organisations internationales, dont les sièges sociaux sont situés en France, afin de créer une image positive de l’élite dirigeante dans les pays de l’Occident démocratique. Les membres de la famille régnante et les proches des hauts fonctionnaires continuent aujourd’hui en France à pratiquer des activités douteuses qui relèvent du blanchiment d’argent et de l’évasion fiscale.

Aujourd’hui, la France étant l’un des leaders de l’Union européenne, développe activement la coopération économique avec l’Azerbaïdjan, dans les secteurs pétrolier français et celui du gaz, l’aviation, la construction et les télécommunications, ainsi que dans le complexe militaro-industriel, en mettant activement en œuvre d’importants contrats avec l’Azerbaïdjan.

À la lumière de cette coopération et du rôle de premier plan de la France dans la promotion des valeurs européennes, nous vous encourageons à accorder plus d’attention à la résolution des problèmes graves dans le domaine de la démocratie, des droits de l’homme et de la lutte contre la corruption en Azerbaïdjan.

Aujourd’hui, les prisons de l’Azerbaïdjan détiennent plus de 100 prisonniers politiques. L’Union européenne, le Parlement européen, le Conseil de l’Europe et l’OSCE ont appelé à plusieurs reprises les autorités azerbaïdjanaises à mettre fin à la persécution des critiques et des opposants des autorités. Les journalistes connus de la communauté internationale qui ont enquêté sur la corruption tels que par exemple Afghan Mukhtarly et Mehman Huseynov, malgré de nombreux appels à la libération, restent toujours en prison.

Les autorités refusent d’enquêter efficacement sur les meurtres de journalistes et autres crimes liés à la violence contre les représentants des médias.

Malgré l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme, l’opposant politique Ilgar Mammadov est toujours derrière les barreaux. Pour le refus de respecter les obligations en matière de droits de l’homme envers le Conseil de l’Europe, une procédure qui peut se terminer par l’exclusion du pays du Conseil de l’Europe a été lancée à l’encontre du pays.

Aujourd’hui, l’état de droit subit un réel déclin des valeurs, les tribunaux sont entièrement contrôlés par les autorités et l’institution d’une profession juridique indépendante est presque détruite ; dans un pays de 10 millions d’habitants – il reste moins de 10 avocats vraiment indépendants ce qui est catastrophique pour la protection juridique.

La perte d’espoir pour la justice et pour les changements démocratiques mènent à une augmentation de la tension sociale qui peut conduire à tout moment à de graves pics de violence et de déstabilisation dans le pays et dans la région. La semaine dernière, les autorités azerbaïdjanaises ont lancé une nouvelle vague de répression contre la liberté d’expression. Ainsi, lors de la couverture des actions de protestation le 10 juillet, une dizaine de représentants des médias en ligne couvrant cet événement ont été détenus et torturés dans la ville de Ganja. En prévision de cette action un certain nombre de publications en ligne indépendantes étaient ont été illégalement bloqués par le ministère des Communications, sans les décisions judiciaires nécessaires, en même temps les procureurs du pays ont ouvert une procédure pénale contre ces publications, la menace d’une arrestation pèse sur le journaliste très connu Mustafa Hajibeyli et sur autres de ses collègues.

Monsieur le Président, membres de Senat, membres de l’Assemblée Nationale, compte tenu des problèmes cités ci-dessus dans le domaine des droits de l’homme et de la démocratie en Azerbaïdjan, nous vous demandons d’utiliser la position internationale et le poids de la France lors des réunions avec les dirigeants azerbaïdjanais pour l’exhorter à libérer de prison tous les prisonniers politiques et les prisonniers d’opinion, mettre fin à la corruption et au blanchiment d’argent à la fois en Azerbaïdjan et dans les pays de l’Union européenne, arrêter la pratique de corruption des politiciens européens dans le but de fermer les yeux sur les violations généralisées des droits de l’homme et de la démocratie en Azerbaïdjan.

Sincèrement,

Emin Huseynov

Directeur exécutif

Institut de la liberté et de la sécurité des journalistes

Pour plus des détails sur la situation en Azerbaijan et pour poser des questions visant la lettre vous pouvez nous contacter sur les e-mails: info@irfs.org ou emin.huseynov@irfs.org aussi au numéro de telephone: +41 78 878 84 28


Dear Mr. President,

Dear Members of the French Parliament,

Ahead of the upcoming official visit by President of Azerbaijan Ilham Aliyev, we kindly request you to raise problems with freedom of speech in Azerbaijan during your meetings and to call upon Ilham Aliyev to release all his critics from prisons and carry out urgent reforms to increase the government’s accountability to the media and the public.

Ilham Aliyev intensified crackdown on his critics immediately after his next questionable re-election in April of this year for a fourth presidential term, which had previously been increased from five to seven years. Having taken over the presidency from his father, the late ex-president of Azerbaijan Heydar Aliyev, in 2003, Ilham Aliyev has destroyed the free press and civil society institutions for his 15 years in office. Through non-democratic changes introduced to the Constitution of Azerbaijan, Ilham Aliyev succeeded in the abolition of the two-term limit for presidency. Having completely cracked down on the democratic institutions, Ilham Aliyev assigned his spouse Mehriban Aliyeva as the first vice-president of Azerbaijan in February 2017, thus creating an example of outrageous nepotism and kleptocracy unprecedented in the whole world.     

Members of the president’s family have taken control over almost entire economy of Azerbaijan, thereby earning the country an embarrassing top place in global rankings in terms of the flourishing of corruption.  

Today, not only the critics and corruption fighters in Azerbaijan are put behind bars, but the scope of persecution of critics has long gone beyond the borders of Azerbaijan. Along with the attempts to harass critics living in political exile in EU countries, the Azerbaijani authorities do not even refrain from attempts to persecute foreign journalists, including those who are French. For example, the authorities have initiated judicial proceedings against prominent French investigative journalists Laurent Richard and Emmanuel Bach

demanding that the French court bring them to account.     

Taking advantage of the existing impunity and the lack of a proper civilian control on the part of the civil society, the practices of corruption and money laundering by the ruling elite of Azerbaijan have also gone beyond the borders of Azerbaijan and spread to the countries of the European Union including France. The high-profile journalistic investigations of the last three years show that Aliyev’s government has bribed European and French politicians and senior officials of international organizations headquartered in France with the aim of creating a positive image of the ruling elite in the democratic Western countries. As we speak, members of the ruling family and relatives of senior officials continue their suspicious activities in France related to money laundering and tax evasion.    

Being one of the leaders of the European Union today, France is actively expanding economic cooperation with Azerbaijan, as the leading French enterprises in the fields of oil and gas production, aviation, construction, telecommunications and military industrial complex are busy implementing large multi-million dollar contracts with Azerbaijan.  

In the light of this cooperation and the leading role of France in promoting European values, we encourage you to pay more attention to resolving the serious problems in the fields of human rights, democracy, rule of law and fight against corruption in Azerbaijan.

At present, there are more than a hundred political prisoners in Azerbaijan. The EU, the European Parliament, the Council of Europe and the OSCE have repeatedly called upon the Azerbaijani authorities to put an end to the harassment of critics and opponents of the authorities. Journalists Afghan Mukhtarli and Mehman Huseynov, who are most well-known to the international community for their corruption investigations, still remain in jail despite numerous calls for their release.  

The authorities refuse to effectively investigate the murders of journalists and other crimes related to violence against media representatives. 

Opposition politician Ilgar Mammadov still remains behind bars, despite the ruling of the European Court of Human Rights for his release. Due to Baku’s refusal to fulfill its human rights obligations, the Council of Europe has initiated a procedure against Azerbaijan that can end with its expulsion from the Council of Europe.   

Today, the rule of law is experiencing a complete decline in values, the courts are under total control of the authorities, independence of the judiciary has practically been destroyed, as only less than a dozen genuinely independent lawyers are left in the country with a population of ten million, which is essentially catastrophe in the field of legal protection.  

The loss of hope for justice and democratic changes leads to an increase in social tension that can at any time result in serious spikes in violence and destabilisation in the country and in the region. Last week, the Azerbaijani authorities launched a new wave of repression against freedom of speech. During the coverage of protests in Ganja city on 10 July, a dozen of representatives of online media covering the event was detained and tortured. On the eve of this event, a number of independent online publications were illegally blocked by the Ministry of Communications in the absence of a required court decision and the prosecutor’s office simultaneously launched a criminal case against these publications, while prominent journalist Mustafa Hajibayli and his other colleagues faced an imminent threat of arrest.     

In light of the above-mentioned problems in the field of human rights and democracy in Azerbaijan, we ask you to use the authoritative international position of France and call upon the leadership of Azerbaijan, in meetings with them, to release all political prisoners from jail, put an end to the pervasive corruption and money laundering carried out both in Azerbaijan and in EU countries, and stop the practice of bribing European politicians for the purpose of turning a blind eye to widespread violations of human rights and democracy in Azerbaijan.     

Sincerely,

Emin Huseynov

Executive Director

Institute for Reporters’ Freedom and Safety

19 July 2018

contact us on the e-mails: info@irfs.org & emin.huseynov@irfs.org or via phone +41 78 878 84 28

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